2012, L’acte fondateur de la présidence de François
Hollande aura donc été son adhésion au Traité négocié par Nicolas Sarkozy et dont
pas une virgule n’aura été changée. Après un référendum irlandais dont l’issue a
été l’adoption du traité, il n’aurait
pu en être autrement : vous imaginez François Hollande, à
peine élu, arriver à Bruxelles et demander une renégociation à des partenaires
européens qui ont mis des mois à négocier ce nouveau traité communément appelé TSCG.
Vingt ans après le Traité de Maastricht, le Traité sur
la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance (TSCG) au sein de l’Union
économique et monétaire (UEM) offre une occasion unique d’approfondir
l’intégration de l’UEM. Face à cela, nous entendons un certain nombre de
Français dire avoir voté pour Maastricht en 1992 et se prononcer contre le
traité dont la ratification sera soumise aux parlementaires la semaine
prochaine. Ils pointent la perte de souveraineté et le fait que l’intégration
européenne aurait échoué. Si l’on suit leur logique, la seule démarche possible
selon eux serait donc la sortie de l’euro. Refuser ce traité, c’est condamner l’Europe à
l’impuissance au motif d’avancées qui n’ont pas encore été réalisées. Or l’intégration
monétaire n’est pas un échec, elle est juste incomplète :
D’une
part, le débat sur les questions de souveraineté ne doit pas empiéter sur le
nécessaire débat relatif aux finances publiques. La France gardera la
possibilité de faire entendre sa voix. L’article 12 consacre d’ailleurs la
proposition qu’avait faite par Nicolas Sarkozy d’un sommet régulier des Chefs
d’Etat et de gouvernement de la zone euro. De ce point de vue là, rien n’a été
modifié.
La vérité, c’est que la France
vit à crédit depuis trente ans et que nous en accusons l’Europe. La vérité,
c’est que 60% de notre dette publique n’est pas détenue par des épargnants
français mais par les marchés financiers, nous rendant de ce fait dépendant.
C’est là que se situe l’enjeu de souveraineté budgétaire dont se prévalent les
opposants au TSCG. Tendre vers l’équilibre des finances publiques, c’est au
contraire un gage de souveraineté pour limiter notre dépendance aux aléas des
taux pratiqués par les marchés financiers.
D’autre
part, ce traité, signé le 2 mars 2012 engage la France, il est vrai, comme il
engage également ses partenaires européens. La France ne vit pas seule en
Europe ! Il faut voir dans cet engagement une occasion unique : celle
d’une réponse institutionnelle en vue d’établir des règles communes de
gouvernance économique et budgétaire. L’occasion également de compléter, par
des règles communes, le traité de Maastricht dont nous venons de marquer le
vingtième anniversaire.
Car il s’agit bien de compléter les engagements
antérieurs. L’histoire de la construction européenne est une construction
progressive, par étapes successives. Le Traité de Maastricht ne fut qu’une
étape instaurant notamment les critères de convergence, dont on voit bien qu’il
n’était pas suffisant pour éviter la situation dans laquelle nous sommes
aujourd’hui.
Il s’agit également de renforcer la gouvernance de la
zone euro pour atteindre des objectifs communs de croissance, d’emploi et de
cohésion sociale. Car il est exact que l’assainissement budgétaire ne peut reposer
uniquement sur la maîtrise des déficits. Cela implique aussi une croissance
suffisante pour soutenir nos finances publiques. C’est pour ces raisons qu’il
était prévu dès le départ de mobiliser 55 milliards d’euros de fonds
structurels non utilisés en faveur du soutien aux PME et à l’emploi des jeunes.
François Hollande n’a eu qu’à maquiller l’ensemble en « Pacte de
croissance » pour masquer son impossibilité de renégocier un traité dont l’accouchement
ne fut pas sans douleur.
Il est intéressant de noter que les objectifs de
compétitivité inscrit dans ce traité vont entrer en totale contradiction avec
la loi de finances pour 2013. Celle-ci s’apprête à augmenter les impôts des
entreprises à hauteur de dix milliards d’euros, alors que le traité engage les Etats
contractants (dont la France) à œuvrer pour la croissance en renforçant leur
compétitivité (article 9). Augmenter les charges des entreprises n’a jamais été
un gage de compétitivité et de création d’emplois.
Ce traité ouvre de nouvelles perspectives
d’approfondissement de l’UEM à moyen terme. Toutefois, ce texte essentiel
aurait mérité de figurer dans notre Constitution au lieu d’une simple loi
organique. D’autant que l’article 3 du Traité expose que ces règles doivent
être « de préférence constitutionnelles ». L’opposition UMP l’aurait
voté au Congrès. En choisissant de passer par une loi organique, la nouvelle
majorité rate une occasion unique de faire l’union nationale, comme en Espagne,
où la Droite a voté avec la Gauche sur la réforme de la Constitution. Quitte à adopter
une règle d’or, nous aurions pu faire l’économie d’en adopter une fausse. Car il
n’y aura aucune garantie constitutionnelle au nécessaire équilibre budgétaire
et nos partenaires européens s’en apercevront très vite… Pour un début de
mandat, c’est une drôle d’entrée en matière dans l’édifice européen…